L’origine
L’origine de Badonviller semble remonter aux derniers siècles de l’époque gallo-romaine, à en juger notamment par son nom qui, sous la forme primitive latine: Baldovillare a pour racine la dénomination franque Bald, Baldi, ou Baldo et pour suffixe le terme latin villare qui habituellement désigne un hameau. Dans la langue romane dérivée du latin, Baldovillare a pris la forme Baudonviller , qu’elle a conservée jusqu’au 17ème siècle. Il est permis de croire que Baldi ou Baldo transformé en Baudon, puis en Badon, désignait un de ces chefs de corps auxiliaire francs entrés au service de l’Empire et recevant en guise de solde, des terres à cultiver.
Comme pour la presque totalité des villes et villages lorrains, l’existence et les manifestations de l’activité humaine, à Badonviller, restent dans les ténèbres pendant toute la période qui précède le 12ème siècle. La première mention certaine figure dans l’histoire de l’abbaye de Moyenmoutier, ouvrage de M. L’Abbé Jérome, où il apparait, sous l’abbatiat de Bertrice (1077-1115), que Roland de Badonviller fit donation à l’abbaye pour sa sépulture, de sa part de franc-alleu (Fonds de terre, soit noble, soit roturier, exempt de tous les droits et devoirs féodaux) qu’il possédait près de Pexonne.
Un acte du 22 juin 1124, relatif à la dédicace de l’église de l’abbaye de Senones, cite parmi les témoins présents Rainero de Baldovillare.
Des templiers à Badonviller.
Nous savons que, dès le 13ème siècle, Badonviller formait une communauté sous la seigneurie des comtes de Salm pour les trois quarts, et des chevaliers du temple pour un quart ; que déjà auparavant, les habitants avaient obtenu des franchises et une organisation judiciaire et administrative comprenant des échevins. C’est là un fait remarquable pour l’époque.
Une charte de mai 1257 nous révèle qu’il y avait des Templiers dans la région Henri IV de Salm et Dame Lorette, sa femme, font communauté avec le Maître et les frères de la Chevalerie du Temple de tout ce qu’ils possèdent à Badonviller et son ban, en tout profits et us, à savoir hommes, femmes, terres, prés, bois, eaux, dîmes, gerbages, moulins, pacages, rentes et toutes seigneuries, à l’exception des hommes d’Allencombes..
Durant trois siècles, la vie de Badonviller fut liée à celle de Senones et soumise aux démêlés politico-religieux-mercantiles des comtes de Salm et des abbés de Senones, Noblesse contre Clergé, Tiers-Etat “trinquant”.
Simple village auparavant, Badonviller ne prend de l’importance qu’à partir du 16ème siècle. En 1574, Diane de Dommartin, alliée familiale des princes de Salm y fait bâtir sa demeure seigneuriale entourant la ville de remparts renforcés par des tours. A cette même période, la ville acquiert un savoir faire notamment dans la fabrication des armes utilisées par les arquebusiers.
En 1509 un “hacquebutier” nommé CHRESTIEN fournit des épieux de chasse au duc de Lorraine.
Trois meules sont installées sur la rivière Blette permettant d’assurer la production à plusieurs sites industriels :
– Des tanneries que l’on dit les plus belles de la province et peut-être de France,
– Des fabriques de draps, de miroirs, de monnaie,
– Une tuilerie.
Le partage du comté de Salm
Un événement d’une importance capitale pour la destinée nationale de Badonviller, marque d’une manière heureuse la fin du 16ème siècle. Le comte jean IX, grand dignitaire de la cour de Lorraine, étant resté célibataire, fit, par contrat de mariage du 12 mars 1597, donation à sa nièce, Christine de Salm, de la totalité de ses biens, en toute propriété. Ce mariage avec le comte François de Vaudémont, qui pour la seconde fois unissait les saumons de Salm aux Alérions de Lorraine, eut lieu le 15 avril 1597.
Des dispositions furent aussitôt prises pour dresser l’inventaire des biens du comté, encore indivis avec ceux du Ringraf comparsonnier. On procéda ensuite au partage, en formant deux lots (A et B) et le sort attribua B au comte de Salm. L’acte de partage fut signé à Badonviller le dernier jour d’août 1598, puis définitivement à Nancy et à Neufviller-sur-Moselle, le 8 et 9 septembre 1598. Ce document, publié en son entier par le Baron F. Seillère dans le bulletin de la société philomatique vosgienne (1893-1894), donne de précieux renseignements sur Badonviller à la fin du 16ème siècle. Il mentionne les noms des propriétaires des 133 maisons de la ville et des 26 maisons des deux faubourgs; il présente également un grand intérêt pour toutes les autres localités du comté de Salm.
Le comte Jean IX étant mort en 1600, le comte François de Vaudémont, prit possession de la partie du comté léguée à sa femme Christine de Salm. On sait qu’après la mort du duc Henri II, François de Vaudémont, son frère, fut reconnu, en novembre 1625, duc de Lorraine et de Bar, et que quelques jours après, il céda ses droits de souveraineté, sauf ceux relatifs au comté de Salm, à son fils Charles IV, époux de sa cousine germaine Nicole, fille d’Henri II. Il conserva d’ailleurs le titre de duc sa vie durant. Il continua de résider à Badonviller jusqu’à sa mort survenue le 15 octobre 1632. Le comté de Salm, hérité par son fils Charles IV, entra ainsi définitivement dans le duché de Lorraine.
François II fit frapper des monnaies dans le seul atelier de Badonviller. Ces testons sont rares et ne sont connus que pour les millésimes 1626, 1628, 1629, 1630 et 1631.
Teston de Lorraine . Comté de SALM-SALM. Atelier de Badonviller. François II 1629 ARGENT – 28 mm – 9,10 g.
La guerre de Trente Ans (1618-1648) ne frappe le pays de Salm qu’en 1635, mais elle se fait ressentir bien avant. Proximité des combats, préparatifs militaires, stationnement et logements de troupes, recrutements militaires, obstacles à la vie économique, les signes se font angoissants. Les craintes rendent la vie difficile, même si le pays peut faire figure de havre de paix en comparaison de ses voisins alsaciens et lorrains. L’agressivité générale ambiante donne lieu à une flambée de procès en sorcellerie et la misère est responsable du développement de la peste. Pendant de nombreuses années, celle-ci couve à bas bruit au fond des forêts, puis elle explose en 1635 de façon importante et peut-être épidémique.
Cependant, ce n’est qu’en 1635 que Badonviller est investie et pillée par les troupes franco-suédoises
C’est par le traité de Vienne du 18 novembre 1738 (mettant fin à la guerre de succession de Pologne)qu’intervient la séparation définitive du comté et de la principauté de Salm. Ce traité de paix qui attribuait le duché de Lorraine et de Bar au Roi Stanislas Leszczynski et après lui à la France, cédait en fait à la France le comté de Salm, c’est-à-dire la moitié du territoire possédé, par indivis, entre le duc de Lorraine et le prince de Salm Louis-Othon, héritier du Ringraf Frédéric. La convention de partage détermine comme limite la rivière de Plaine en stipulant notamment que le roi de France et le roi de Pologne, duc de Lorraine et de Bar, cèdent au prince de Salm-Salm toutes les terres et lieux qui leur appartiennent nuement ou par indivis ou en commun comme comtes de Salm, au-delà et à gauche de la rivière de Plaine. En échange, le prince de Salm a cédé au roi de France et au roi de Pologne, les terres, lieux et maisons avec leurs appartenances ou dépendances, qui lui appartiennent nuement, ou par indivis, ou en commun avec le comte de Salm en deçà et à la droite de la plaine, laquelle sera commune, et le milieu de la dite rivière fera aussi séparation de la principauté avec la Lorraine et le comté de Salm.
Ruines du château de Pierre-Percée en 1755
Cette convention précise également : Que les officiers et sergents du prince de Sam-Salm établis à Badonviller, étaient libres de se retirer de la dite ville et d’en transférer leur domicile dans la principauté. Senones devint alors la capitale d’une principauté allemande autonome, enclavée dans le territoire français et constituée en faveur du feld-maréchal Nicolas-Léopold, prince de Sam-Salm. Tous les fonctionnaires publics visés par l’article de cette convention se retirèrent dans cette ville. Cette séparation si désirable au point de vue politique, eut des conséquences désastreuses pour Badonviller. L’ancienne capitale resta le chef-lieu d’une prévôté, dont le titulaire cumulait les Finances et la Justice du comté de Salm, encaissant les impôts, soldant les dépenses et jugeant les procès tant au criminel qu’au civil ; il présidait en outre aux plaids annaux* , à la saint Georges et à la saint Martin. Cette nouvelle organisation dura jusqu’à la révolution de 1789, qui fit table rase des anciennes institutions et fit entrer, la principauté séparée de Salm-Salm elle-même, dans le cadre de l’unité française.
* Aux époques mérovingienne et carolingienne,un plaid (en latin placitum) est une cour publique ou une assemblée, Par la suite, le terme de plaid est utilisé à propos de la réunion (simple assemblée ou audience) des habitants d’une communauté, à la demande du seigneur, chaque année. On tenait alors des « plaids banaux » ou « plaids annaux ».
La révolution de 1789.
Ce grand événement débuta à Badonviller par une assemblée du Tiers-Etat tenue le 17 mars 1789, dans l’hôtel de ville. La ville compte 380 feux, choisit comme député : Joseph Duparge, prévôt ; Ferdinant Pleigner, syndic ; Louis Joseph Chenal, rentier ; Joseph-Huber Ganier, négociant, chjargés de porter le cahier de remontrances de la ville, à Lunéville pour l’assemblée fixée au 23 mars, tenait 31 articles, dont certains cités ci-après :
- Qu’aucun impôt ne puisse être établi ou prorogé, que du consentement de la Nation.
- Qu’on achève la route d’Ogéviller à Badonviller et qu’on la prolonge jusqu’à Allarmont.
- Que le sel soit moins cher et de meilleure qualité.
- Que le tabac soit meilleur et le prix diminué de moitié.
- La suppression de la dîme des pommes de terre.
Les invasions de 1814 et 1815 n’ont pas laissé de souvenir pénible dans la région de Badonviller. Celle de 1870 s’est manifestée, à la fin de septembre dans la contrée, par l’arrivée d’une colonne de 1200 hommes débouchant de la forêt de la charbonnière. Les allemands occupèrent la région du 30 septembre 1870 au 28 août 1871. Durant cette période, Badonviller fut soumis à de multiples réquisitions dont le paiement d’une somme de 3.433 francs pour quote-part de la contribution de 750.000 francs imposée aux trois arrondissements de Toul, Nancy, Lunéville, sous prétexte de dommages causés aux nationaux allemands.
Au 19ème siècle, l’industrie locale prospère et l’on distingue :
Une fabrique d’alênes, deux moulins à grains, une fabrique de calicots, des tanneries. La faïencerie va bientôt prendre de l’essor et devenir l’établissement le plus important de l’Arrondissement.